Lettre ouverte aux candidat.e.s à la présidentielle 2022
Madame, Monsieur,
Nous sommes l’association RAIF (Reconnaissance des Adoptions Illégales à l’International en France).
Le 11 février 2021, nous avons lancé sur change.org, une pétition demandant l’ouverture d’une enquête sur les adoptions illégales en France depuis 1960. Nous avons ainsi réagi à la décision des Pays-Bas de suspendre l’adoption internationale, après qu’une enquête indépendante sur les adoptions à l’international ait révélé de graves dysfonctionnements systémiques, ne garantissant pas l’intérêt supérieur de l’enfant. Notre pétition a récolté au 5 avril 2022, plus de 41.300 signatures et le soutien de nombreuses personnalités et d’associations de personnes adoptées. Depuis, cette pétition, l’association RAÏF a obtenu un siège observateur à la HCCH.
Aujourd’hui, nous vous écrivons au candidat et potentiel.le futur.e président.e de la république française, parce qu’il est urgent que l’État français porte un regard de vérité sur ces adoptions illégales. Nous attendons du futur ou de la future chef.fr d’État qu’il ou elle prenne les dispositions nécessaires pour accompagner et soutenir toutes ces personnes adoptées et leurs familles.
Il est temps de replacer les personnes adoptées au cœur du système de l’adoption et de considérer la valeur empirique de leurs vécus, pour améliorer le système d’adoption français au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant comme le définit la Convention de la Haye. Il est temps aussi de replacer éthique et transparence dans le parcours de l’adoption internationale.
Si l’adoption internationale s’est véritablement développée à partir de 1960, l’absence de cadre juridique avant la Convention de La Haye de 1993, a permis toutes sortes de dérives. Aujourd’hui, les adoptés du monde entier font le même constat : les pays d’accueil diffèrent mais les intermédiaires et les pays d’origine restent souvent les mêmes. Ces dysfonctionnements observés depuis plusieurs décennies, vont du récit erroné à la production de faux documents et jusqu’aux réseaux criminels organisés. Au-delà du défaut de données chiffrées et historiques fiables et accessibles ou d’études sociologiques et anthropologiques sur l’adoption internationale, les personnes adoptées malgré leur droit à l’information, sont confrontées à une troublante opacité lorsqu’elles souhaitent connaître leurs origines. À cette omerta, s’ajoute le non-respect des lois, conventions internationales et droits fondamentaux de l’enfant. Des irrégularités confirmées par des spécialistes et acteurs de l’adoption internationale comme l’a démontré l’enquête publiée dans Le Monde les 8, 9 et 10 décembre 2021.
Vous président.e :
- Mettrez-vous en place une enquête sur les adoptions illégales depuis 1960 à nos jours comme nous le demandons ?
- Quels changements législatifs votre gouvernement réalisera pour combler le vide juridique en matière d’adoption illégale, en termes de reconnaissance, réparation et condamnation ?
- Quels contrôles seront mis en place, au-delà de l’article prévu dans la nouvelle loi adoption, pour s’assurer que les opérateurs respectent le cadre légal de leur mission ?
- Quelle position prendrez-vous au sujet du délai de “ prescription” qui nous est encore imposé ?
- Autoriserez-vous l’accès aux ADN sécurisés et encadrés pour les personnes en recherche d’origine ?
- Garantirez-vous la représentation des personnes adoptées au sein des organisations compétentes sur le sujet, toutes procédures confondues (nées sous le secret, adoption simple ou plénière, nationale ou internationale) afin qu’elles puissent porter la parole en tant que principaux intéressés.
Les personnes adoptées, leurs familles et nos 41.300 signataires, seront sensibles au soutien que vous pourriez nous apporter. Confiant en votre bienveillance, nous espérons que ce courrier saura retenir toute votre attention, afin de faire avancer cette cause aussi sensible que juste.
Je me tiens à votre entière disposition pour tout échange à ce sujet et je vous prie de croire, Madame, Monsieur, en l’expression de notre considération.
Emmanuelle Hebert et Erick-Alexander Mijangos
Co-fondateur.trice de l’association RAIF